[ Retour ]

4/13 – Trente deux ans et toutes mes dents…

32 ans et toutes mes dents…

Je ne devais pas rester plus d’une nuit en Slovénie et bien j’y suis resté une semaine pleine. Le voyage est ainsi fait que son rythme ne se calcule pas sur une carte, mais se vit véritablement au gré des rencontres et des aléas de la route. La proposition de Uros et Kristina de réparer les quelques soucis mécaniques chez eux dans un garage parfaitement aménagé pour recevoir l’auto était une proposition trop belle pour la refuser. S’en est suivi le démontage du turbo pour changer son joint d’embase (réparé avec trois épaisseurs de cannettes de Red Bull), de la ligne d’échappement dont les silentblocs avaient cédé, des bavettes dont le caoutchouc n’était pas d’assez bonne qualité et enfin la réalisation de bien des aménagements intérieurs. Ce qui est drôle dans ce couple, c’est que Uros ayant décidé de ne pas s’occuper de la mécanique, c’est Kristina qui s’est affranchie de cette tâche sur leur deux ans de voyage. La voici calée en mécanique comme pas deux et son aide a été plus que précieux pour repenser les points à corriger.

S’en est suivi la découverte de la côte Croate. Une merveille qui me rappelle beaucoup les côtes Corse jonchées de petites criques à l’eau d’un bleu cristallin. La température de 35 °C devenant vite insupportable dans une auto non climatisée, il ne m’a pas fallu beaucoup de prétextes pour plonger la tête la première dès que l’envie m’en prenait. Soit deux à trois fois par jour minimum.

J’ai passé ma soirée d’anniversaire à Dubrovnik, ville extrêmement romantique, un vrai décor de théâtre. Des Australiens curieux de voir des kangourous sur la voiture m’ont amené à rencontrer l’organisateur d’un défilé de mode dans une boite de nuit. J’ai donc passé ma soirée comme photographe du défilé tout étant traité comme un VIP en open-bar. Soirée rigolote au demeurant d’autant que la France venait de gagner au foot. Je ne l’ai appris que plus tard avec les deux étudiants bordelais avec qui j’ai passé la fin de la nuit.

J’ai donc tenté de rejoindre Sofia, la capitale bulgare, le lendemain. Challenge impossible à tenir puisqu’il n’y avait pas moins de cinq postes-frontière à passer et pas des moindres (Croatie, Serbie Monténégro, Kosovo, Macédoine et Bulgarie) et près de 800 kilomètres de route de montagne.

Pour l’escale du soir, j’ai tenté de renouer avec les bivouacs magnifiques vécus lors des précédents voyages. Je me suis donc engagé de nuit sur le premier chemin forestier venu. Malheureusement celui-ci ne servait que pour le passage des engins de hallage du bois. Je me suis donc fait une petite excursion en tout-terrain. Sorte de revanche sur mon dernier voyage en Bulgarie où j’avais dû être pris en remorque par une Jeep UAZ quelques années plus tôt. Progressivement les difficultés sont devenues croissantes et il m’a fallu exploiter les incroyables ressources de l’Isbamobile pour rejoindre un endroit assez à plat pour pouvoir dormir. Le lendemain matin réservera son lot de surprises puisqu’il a plu toute la nuit et que les chemins déjà bien boueux de la veille se sont transformés en jolis bourbiers. Avec le chargement sur le toit et les pneus trop gonflés, j’ai donc fait quelques cabrioles. Une fois de plus la chance m’épargnera une fin de voyage trop rapide tout en constatant que les choix retenus sur la voiture sont vraiment les bons (pneus terre, les incroyables blocages de différentiels, un très bon compromis de suspensions…). Dans des moments comme celui-là, l’auto prouve son incroyable polyvalence. Aussi à l’aise en camping-car qu’en vrai engin de tout-terrain. Tout en étant capable de se faire flasher deux fois à 100 à l’heure au lieu de 60 sur les routes bulgares défoncées, c’est vous dire. Pas de problème de ce côté-ci n’ont plus, le capital sympathie apporté par les kangourous me libèrera après dix minutes de palabre. Et discuter avec un Bulgare qui ne parle qu’un anglais approximatif à quelque chose de surnaturel puisque leur façon de dire oui ou non est totalement inverse de la nôtre : de bas en haut pour dire non et de gauche à droite pour oui. Vous imaginez les situations grotesques dans lesquelles vous vous mettez pour demander si le pompiste accepte la carte visa ou si vous refusez de payer l’amende….

Je suis maintenant chez Vascu et Vania, chez qui j’avais passé de si bons moments en 2002. Ni l’un, ni l’autre n’étaient au courant de ma venue si bien que la surprise fut totale. Après quatre ans, un petit retour à Véliko Turnovo me fait le plus grand bien. Histoire de raconter l’évolution de nos existences depuis tout ce temps. Vascu est toujours aussi nostalgique de la vie qu’il aurait dû avoir en France avant le décès prématuré de sa précédente femme recrutée pour être prof à Nanterre tandis que Vania fait toujours la chopska salade la plus goûteuse du pays, surtout accompagné de leur rakia maison. Le niveau de vie semble avoir bien augmenté. Vascu n’a plus à emprunter l’unique poste de l’immeuble pour me faire écouter de la musique, mais communique en permanence avec son fils travaillant en Chine via Skype. Dans la rue, la pauvreté n’est pas la même non plus. Les choses avancent donc ici aussi et ce n’est pas un mal.

Je pars demain matin pour Istanbul en longeant la côte de la Mer Noire, car il me faut obtenir les visas iraniens et turkmènes avant de rejoindre Quentin à Téhéran.

Bises à tous

Marc.