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D’Alexandre le Grand au communisme

Depuis l’Albanie nous cherchons à franchir une frontière qui sépare ce pays de la Macédoine. Surprises et hasards du voyage, cette frontière n’existe plus. Partant du principe de ne jamais rebrousser chemin nous décidons de visiter le nord de la Grèce. Marc n’est encore jamais venu ici et il découvre totalement la langue grecque, pas si évidente à déchiffrer sur les panneaux qui jalonnent la route. A nous les vieux cailloux !
Nos bivouacs ici sont assez géniaux. Un arrêt à Pella, ancienne capitale de royaume de Macédoine et de notre vieil ami Alexandre Le Grand. L’Isbamobile prend ses quartiers sur un champ qui renferme encore bien des trésors enfouit. Le Musée archéologique est à deux pas. Une journée complète nous transporte dans la Grèce du quatrième siècle avant Jésus-Christ. Le site est hallucinant, les mosaïques magnifiques et les objets du quotidien émouvants. Des jouets d’enfants côtoient de la vaisselle fine et de l’orfèvrerie à son plus haut degré technique.

article30010Nous sommes littéralement envoûtés mais ce n’est qu’un début ! Rassemblant laborieusement mes connaissances sur la Macédoine antique nous retrouvons la capitale du papa d’Alexandre, ce bon vieux Philippe II. Direction Verghina pour aller faire un petit coucou à son tombeau. Les tombes et le complexe qui les renferme sont mystiques. Ambiance sombre et lumières tamisées pour préserver ces trésors de l’antiquité. Portes de tombeaux peintes de scènes mythologiques ou de chasse. Vaisselles de banquet en argent et diadèmes en or figurant chênes et glands. Nous restons sans voix, les yeux ébahis et c’est à regret que nous quittons le site.
Nous arrivons de nuit, dans une circulation dantesque, à Thessalonique. Demandez à votre famille, cette ville n’est autre que l’ancienne Salonique et nombreux sont nos arrières grand-pères à y être passés durant la première guerre mondiale. La première impression n’est pas terrible. Beaucoup de voitures, grands immeubles en bord de mer, c’est un peu l’agression. Nous trouvons néanmoins un bivouac un peu à l’écart en font de mer, en compagnie des pécheurs. Le lendemain, à l’heure du pique-nique nous rencontrons Stellios, grec marié à une française. Il nous propose de faire une intervention sur notre voyage auprès des enfants de l’école française de Thessalonique.

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Nous voilà donc devant une cinquantaine de stroumphfs âgés de 7 à 11 ans. Nous leur projetons le diaporama que nous avons l’habitude d’utiliser pour un tout autre type de public sur les salons de voyages. Les réactions sont bien différentes de celles auxquelles nous sommes habitués. Les enfants hurlent devant les photos d’animaux, chantent, tapent des mains et dansent sur la musique. Les questions fusent et les professeurs tentent de recadrer les enfants surexcités. L’Isbamobile entre en jeu ou plutôt dans la cour pour une visite de notre petite habitation. Marc les fait monter les uns après les autres. Les enfants sont ravis et improvisent même une bataille de polochons sous le toit. Avant de partir une fillette haute comme trois pommes s’accroche à ma jambe, elle voudrait bien venir avec nous !
Nous poursuivons nos investigations dans cette ville qui finalement nous plaît de plus en plus. De vieux vestiges se cachent un peu partout dans la forêt d’immeuble récent et les musées de la ville sont très riches.
La Grèce fait depuis quelque temps la une sur ces difficultés économiques. La vie y est très chère et pourtant les salaires y ont été divisés par deux. Malgré tout, les grecs sont vraiment très sympathiques et souriants. De nombreux gestes amicaux quand nous passons en voiture, des gens curieux qui viennent nous parler. Mieux encore au bord du gouffre financier ils trouvent encore le moyen de nous nourrir. Un des pêcheurs devant notre bivouac nous donne ainsi sa récolte de calamars du jour ! Cette étape grecque nous enchante et nous prolongerions volontiers notre séjour, mais nous avons rendez-vous à Istanbul pour récupérer un colis.
Nous entrons en Bulgarie par le Sud Est du pays. Première familiarisation avec le cyrillique qui sera bien utile par la suite. Un arrêt nous mène dans le charmant petit village de Melnik. Nous avisons de grands bocaux qui nous semblent de loin être remplis d’oignons au vinaigre. Gourmands, nous achetons nos trois bons kilos de ce qui s’avère de plus près ressembler en fait à des minis poivrons blancs. Nous croquons joyeusement dedans pour accompagner le vin rouge local. Et là ô surprise ! Nos yeux se mettent à pleurer, la moitié de notre bouche part avec ce qui ne sont autres que des piments bien corsés. Fou rire un peu baveux avec l’aubergiste qui se moque gentiment de nous. Nous voilà avec trois kilos de tchouchkas sur les bras et nous décidons d’en faire usage de sanction si Marc ou moi faisons une bêtise. De quoi motiver à rester très vigilent !
IMG_4181Nous faisons un passage obligé par le Monastère de Rila. Lieu de culte orthodoxe incontournable situé à l’écart dans les montagnes. Au réveil un vent glacé nous accueille, il fait – 5 degrés, bien loin des 25 degrés de la Grèce. A grand peine nous extrayons des polaires et des bonnets du bordel de la voiture. Le monastère est une pure merveille que nous photographions à l’infini. C’est une époque de l’année idéale pour venir ici.

La forêt tout autour est parée des couleurs d’automne et le sommet des montagnes est saupoudré de neige. Nous décidons d’aller toucher un peu cette neige avant le coucher du soleil. Marc sort le drone pour faire quelques photos aériennes. Et là c’est le drame ! Le drone part en vrille et vient se coincer dans un sapin enneigé à quinze mètres du sol. Marc sort donc cordes, baudrier et scie pour aller le récupérer. Après pas mal de temps, d’efforts et quelques craquements inquiétants, il redescend en ayant délogé l’engin de ces hautes branches.
Petit détour par la ville de Plovdiv avant de rejoindre Buzludhja.

article30073Monument complètement délirant de l’ère soviétique. Perdu au milieu des montagnes il se dresse tel un fantôme d’une autre époque pas si lointaine. Bien abîmé de nos jours, cette espèce se soucoupe volante conserve encore partiellement des mosaïques à l’intérieur. Le thème tourne autour du peuple bulgare, de Karl Marx et de Lénine. La musique du film « Good bye Lenine » tourne en boucle dans la voiture. Atmosphère, atmosphère !
Nous rejoignons la mer noire en quête d’un bivouac technique pour préparer l’Isbamobile pour le froid. La route nous mène à Sozopol, petit village de pêcheurs aux vieilles maisons de bois. Après un tour dans la ville nous regagnons la voiture pour trouver le lieu idéal à l’écart des habitations. Un petit mot nous attend sur la portière. Daniel et Monique, deux français qui voyagent sur leur bateau Pandora, nous invitent à venir y boire un verre. Ils nous parlent voyages bien sûr et évoque leur rencontre avec des archéologues français qui fouillent ici. Ni une ni deux nous décidons d’aller à leur rencontre. Ce qui nous vaut une belle visite privée du Musée archéologique de la ville.
La halte à Sozopol s’éternise et Monique a l’occasion de nous faire déguster ses bananes flambées. Une merveille !

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Nous trouvons un promontoire herbeux en pleine ville et décidons de nous y établir pour travailler sur la voiture. A cette occasion nous faisons la connaissance d’une famille bulgare avec qui nous partageons repas et bons moments. Il nous faudrait pourtant partir d’ici.
Changement de programme, une douleur fulgurante me réveille une nuit. Le lendemain matin j’erre tel un zombie autour de la voiture, rien à faire c’est une rage de dent. En urgence je trouve une dentiste dans le village mais je ne suis pas très rassurée par la qualité des soins dentaires ici. En fait le cabinet est impeccable et les instruments sont tout récents. Le seul inconvénient c’est que la dentiste ne parle que le bulgare ou le russe. Elle fait donc appel à une adolescente parlant anglais pour qu’elle puisse lui traduire. La traduction est partielle, je m’en rends compte un peu trop tard. Une belle souffrance et voilà la dentiste qui exhibe mon misérable nerf au bout d’une aiguille. J’ai raté quelque chose là non ?
Le soin de cette dent nous demande une semaine de plus à Sozopol. C’est là que nous touchons du doigt le paradoxe du voyage. Arriver dans un lieu inconnu à quelque chose d’à la fois excitant et effrayant. Pourtant très vite les repères sont là, des habitudes se prennent et des contacts se nouent. Le lieu n’a alors plus rien d’inquiétant mais une mauvaise impression de routine s’installe. Hé oui l’impression de routine au bout de seulement 10 jours qui nous poussent à vouloir partir voir ailleurs. Est-ce le mode voyage ? Comment faisons-nous dans notre quotidien parisien pour ne pas ressentir si fortement cette routine ? Ne sommes-nous que des occidentaux gangrenés par l’impatience et le besoin d’action sans pouvoir profiter de ces instants ?
C’est donc avec soulagement malgré nos belles rencontres ici que nous prenons la route de la Turquie.
Bye Bye l’Europe, à nous l’Asie !

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