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Sur la route des monastères du Caucase

Déjà quatre mois et demi que nous avons quitté Paris ! L’Isbamobile a parcouru sans encombre 11 000 kilomètres et met pour la première fois ses roues dans le Caucase. Nous y entrons par le Sud de la Géorgie, dans le village de Vale. Ce qui frappe au premier abord, c’est l’alphabet géorgien. Il est certes très beau graphiquement, mais indéchiffrable et ne ressemble à rien de connu. Le pays quant à lui ne respire pas la richesse. Les maisons sont en grande partie faites de bois mal jointé d’où sort la fumée des poêles. Des barrières en bois et des tuyaux de gaz qui relient le tout, voici pour le premier aperçu de ce nouveau pays.

En bord de route des panneaux marrons signalent les sites potentiellement intéressants, et il faut bien le dire ce sont surtout des églises et des monastères. Un d’entre eux indique une distance de 8 kilomètres. C’est l’heure de notre première nuit ici, alors va pour ce monastère. La piste qui y mène est assez raide et se compose principalement d’un mélange de neige et de glace. Au fond d’une vallée traversée par une rivière en partie gelée, surgit une petite église. Et ce qui devait nous prendre une heure à visiter nous prend finalement cinq jours. Oui, nous avons bel et bien été kidnappés par des moines orthodoxes !

WEB50003Peu échaudés par l’aventure, nous nous dirigeons vers un autre monastère situé à vingt kilomètres de là. A Zarzma nous admirons des fresques dans un état de conservation exceptionnel. Pendant que Marc prend des photos, j’engage la conversation avec une jeune femme, Anna, et les moines qui se trouvent sur le perron de l’église. Un nouveau traquenard s’organise ! Ils nous proposent de rester manger, puis de rester dormir. Au lendemain, tout recommence, après un nouveau repas, ils nous proposent de rester encore. Décidément c’est une manie ! Voilà six jours que nous sommes dans le pays et nous avons à peine parcouru cinquante kilomètres ! Six jours passés avec des moines adorables, proches de la vie de tous les jours, des jeunes, des femmes, des enfants. Des gens ouverts, joyeux et incroyables chanteurs. Nous n’avons pas choisi à l’avance le thème des monastères pour visiter ce pays, il s’impose à nous comme une évidence.

Avant de nous diriger vers l’Arménie, nous visitons de nombreux monastères de plus ou moins grande importance. Nous empruntons de petites routes enneigées sensées nous mener à de nombreux sites dignes d’intérêt. Les traces de véhicules s’arrêtent et nous tentons péniblement d’avancer, entêtés que nous sommes à ne pas mettre de chaines sur les roues de la voiture. Un cavalier surgit et nous explique que nous n’irons pas plus loin, mais que par contre nous pouvons venir chez lui ? Nous arrivons dans un village perdus et en partie abandonné. Toute une famille nous accueille dans un lieu sans électricité et où l’eau va se puiser à la source située non loin. Au menu vous reprendrez bien un peu de gras de mouton?

Nous repartons sur les routes plus praticables afin de gagner la frontière arménienne. Les douaniers nous accueillent très gentiment mais tout en nous demandant : « Mais pourquoi venir ici en plein hiver ? Retournez donc à Paris ! Ici ils prévoient -36 °C !». Effectivement il fait -20°C à ce moment-là, mais les températures remontent dès le lendemain.

WEB50007Nous plantons notre bivouac dans la petite ville de Talin, près d’une vieille église. Tous les voisins viennent toquer à la voiture pour nous proposer un thé. Nous restons quelques jours dans la famille de Suyzi et Anna, deux jeunes femmes qui font leurs études Erevan. Elles parlent anglais et nous permettent de communiquer plus facilement avec les amis et la famille. L’hospitalité arménienne nous fait penser à la Géorgie. Ici par ailleurs les français ont la côte. Déjà parce qu’une importante partir de la diaspora arménienne vit en France, mais aussi parce que l’Etat français a été le premier pays à reconnaître le génocide arménien. Presque cent ans après cet épisode de leur histoire ainsi que la perte d’une partie de leur territoire est très vif. Nos hôtes nous font découvrir la cuisine, le vin et le cognac arménien. A notre réveil, ils nous concoctent un met de choix, seulement préparé une fois par mois en hiver. Des pieds de bœufs en soupe accompagnés de grandes rasades de cognac. Sans même un café dans le ventre, nous tentons d’ingurgiter cette espèce de gélatine très collante qui oscille entre un goût de tripes et de pied. C’est assez particulier et notre estomac se révolte, impossible de finir nos assiettes. Ne croyez pas que l’on maigrit forcément en voyage, bien au contraire ! Les passagers de l’Isbamobile reprennent la route, alourdis par quelques kilos de plus.

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En Arménie, les monastères sont légions. Ils diffèrent cependant de ceux de Géorgie. Ici plus de fresques sur les murs mais des centaines de Khachkars. Ce sont ces croix sculptés que l’on retrouve un peu partout et qui datent de différentes époques. Malgré les nombreux tremblements de terre dans le pays, la plupart de ces églises restent debout après des siècles. Disséminées dans tout le pays nous les pourchassons inlassablement du lac Sevan en passant par le Nord du pays. Les paysages montagneux offrent beaucoup de promesses, mais à une d’autres périodes de l’année. Les arméniens nous conseillent de revenir en juin, où la saison de l’abricot, spécialité du pays, bat son plein. L’automne est aussi une saison à privilégier pour se rendre ici sans doute à cause du climat, car les forêts sont assez rares !

Erevan mérite également un petit détour. Capitale du pays, elle ressemble plutôt à une grande ville comme Lyon. Architecture soviétique au rendez-vous d’une cité qui se métamorphose petit à petit. Il faut absolument aller voir le Musée National qui possède de très beaux objets, mais qui pêche par le manque de cartels en anglais. Autre lieu incontournable, le Musée et le monument du génocide arménien.

WEB50008Les routes arméniennes sont de plus ou moins bonnes qualités. Pas de soucis sur les grands axes, mais le réseau secondaire promet quelques secousses. L’hiver rajoute à cela une bonne couche de glace qui peut s’avérer un peu dangereuse dans les virages. L’Isbamobile expérimente quelques têtes à queues et prouve que même à faible allure, il en faudrait vraiment peu pour qu’elle ne se retourne. De nuit, à l’heure de quitter la route en chasse d’un bivouac, elle observe également une fâcheuse tendance à se retrouver coincée dans les congères. Heureusement, avec un treuil à l’avant et un treuil à l’arrière, elle sort facilement de tous ces pièges.

Pour rallier l’Azerbaïdjan, il faut obligatoirement repasser par la Géorgie. Après quelques ébats dans des trous boueux et un usage forcené du treuil, nous arrivons dans la capitale du pays. Tbilissi se situe entre modernité et vieille ville. Nous y retrouvons des amis géorgiens rencontrés au monastère de Chule et qui se proposent de nous guider ici. David et Constantin nous mènent en premier lieu manger et boire à outrance.WEB50010
Nous pouvons ensuite flâner dans cette charmante cité. Le temps est plus que clément et c’est en pull que nous découvrons les multiples points de vue et monuments de la capitale. Avant de partir, une marche arrière hasardeuse dans les étroites ruelles de la vieille ville nous coûte un phare arrière. Nous récoltons les débris afin d’en recoller patiemment le puzzle.
Le nord du pays nous attend pour nos derniers jours ici. Impossible de ne pas aller voir les monastères qui se dessinent sur fond de chaîne du Caucase ! Les souvenirs de notre séjour ici défilent pendant que nous approchons de la frontière azérie. Nous savons qu’ici débutent les embarras administratifs et autres formalités interminables.

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