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Egypte

L’Égypte, nouvel eldorado des raids 4×4 !

 

Depuis les derniers incidents en Mauritanie, les organisateurs de voyages 4×4 se tournent tous vers l’Égypte. Cette destination offre une vraie diversité de paysages capable de rivaliser avec n’importe lequel des pays nord-africains à tendance sablonneuse pour peu que l’on dispose d’un peu de temps. Voici le récit de trois semaines passées sur le raid Khéops de Sud Expé, une agence que l’on ne présente plus.

Textes et Photos : Marc Mellet (Action4x4, 2010)

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EGYPTE-MELLET014Port de Marseille. Dix heures du matin. La file d’attente gonfle petit à petit comme si de rien n’était. Le départ aura bien lieu depuis la cité phocéenne. Seule Daphnée, du bureau de Sud Expé se souvient que la veille encore, la compagnie CGM ne pouvait confirmer le départ. Les affaires maritimes bloquaient le bateau, car ses documents n’étaient pas en règle.

La semaine dernière déjà, cela avait bien perturbé la traversée du raid précédent qui avait dû faire un aller-retour jusque Gènes, pour rien. Mais ce coup-ci tout va bien, la CGM ne nous prendra pas en otage.

Je me joins aux dix-neuf équipages clients qui embarquent pour vingt-quatre jours d’aventure à travers la Tunise, la Libye et l’Égypte. Nous serons accompagnés de trois véhicules d’organisation (ouvreur, médecin et mécano) ainsi que du camion Man 8×8 dont Christian Beilles, le responsable de Sud Expé, est si fier. Notre boucle de onze mille kilomètres devrait nous faire découvrir quelques-uns des plus beaux endroits de cette partie du Nord-Est africain lors de cette première édition du raid Khéops.

Sur le bateau, les mini-groupes se constituent déjà par affinité, car les participants sont majoritairement des habitués de l’agence. Le temps de charger les GPS, d’échanger quelques vieux souvenirs que nous sommes déjà au port de la Goulette. Il nous faut traverser la Tunisie rapidement, car le voyage commence réellement en Libye et le timing est serré. Quatre cents kilomètres plus loin, l’hôtel de Matmata.

Le lendemain, trois heures pour passer la frontière libyenne, deux cent soixante-dix kilomètres pour rejoindre Sabratha et nous pouvons visiter l’une des plus belles villes romaines de la Méditerranée.

Bien souvent éclipsé par Leptis Magna que nous visiterons au retour, Sabratha n’en reste pas moins une ville magnifiquement conservée. Nous passons l’après-midi à contempler ses vestiges et l’organisation très complexe des ruelles. Le théâtre, visible à des kilomètres depuis sa restauration en 1920, reste la pièce la plus impressionnante de ce site deux fois millénaire.

La journée suivante se passera encore sur le bitume puisqu’il faut rejoindre Sebha presque huit cents kilomètres plus au Sud. Ce n’est qu’après avoir quitté la plus grande ville du Sahara libyen que nous prendrons la piste pour une journée non moins éprouvante. Cependant, le dernier long plateau rocailleux débouche sur un spectacle surprenant qui récompensera tous les efforts : Waw al Namus. Au centre d’un cratère de sept kilomètres de diamètre recouvert d’un sable noir d’une profondeur toute volcanique, s’érige un vieux cône éruptif autour duquel trois lacs aux eaux cristallines attendent patiemment d’être réunis par une improbable montée des eaux. On ne pouvait imaginer meilleur accueil pour notre première journée dans le désert. Malheureusement, le vent s’invite à la fête et nous chasse littéralement des lieux. Il s’invitera ainsi plusieurs heures par jour pendant au moins deux semaines. Le mois d’avril est celui des tempêtes de sable. Nous le savons maintenant.

EGYPTE-MELLET018Le premier bivouac se fera non loin de là, à l’abri des moustiques. L’occasion de comparer l’ingéniosité des solutions de couchage : tente « deux secondes », de toit, couchage dans l’auto, ou à la belle étoile sur lit picot. Chacun peut enfin retrouver les sensations qu’il connaît bien et qui forment la base des motivations qui poussent à toujours revenir dans le désert. Rappelons-le, les participants des voyages longs comme celui-ci ont souvent de l’expérience et cela se voit lorsqu’ils retrouvent leurs marques au bivouac.

Hormis un Navarra et deux Defender, notre horde sauvage est constituée exclusivement de Toyota. Quatre-vingt-six pour cent de Toy ! Encore un gage d’expérience. Du Hilux au 100 ultra-préparé en passant par le 80, le 95 et le 75/78, tous les Land Cruiser aptent à l’aventure sont représentés. Les 55 manquaient à l’appel ? Nous les trouverons à Tazerbo en version essence toujours prêt à affronter le désert après vingt-cinq ans de bons et loyaux services.

Cette étape entre le volcan Namus et Tazerbo marque les retrouvailles avec nos premiers cordons de dunes. Les difficultés progressives obligent à reprendre les bonnes habitudes du dégonflage. Le bivouac se fera dans la palmeraie qui jouxte la ville permettant ainsi à une partie du groupe de faire les pleins.

EGYPTE-MELLET010Demain, nous entamons la traversée de la grande mer de sable pendant trois jours où il ne sera pas possible de ravitailler. Les deux cents litres minimum d’autonomie imposés par l’organisation prennent ici tout leur sens. Certains seront même obligés de négocier quelques litres auprès du camion d’assistance pour aller au bout. Ce dernier en impose par ses huit roues motrices. Sa consommation dans le sable saura aussi en faire tousser quelques-uns : cent litres au cent kilomètres… Soixante-trois litres sur le bitume. Heureusement que le gasoil est dix fois moins cher ici qu’en Europe. Cependant, il faut reconnaître que le camion apporte une solution logistique intéressant notamment en termes de ravitaillement. Plusieurs fois déjà, sur d’autres raids, le Man a fait des allers-retours nocturnes et servi de réservoir ambulant pour sauver des situations improbables où les pompes des villes sont à sec. Au quotidien, mille litres d’eau attendent les participants pour se doucher au pied du camion tandis que des tables et bancs permettent de prendre les repas en commun avec les membres de l’organisation. En tout cas dans les dunes, c’est un vrai bonheur de voir systématiquement le pont avant s’envoler à un mètre du sol. Nous envions parfois l’aventure que vivent Thierry et Stéphane tant il ne faut pas perdre l’élan qui permettra de passer. À bord, la concentration est permanente. Un plantage avec le camion et de nombreuses heures s’évaporent en pelletage, dégonflage et regonflage.

EGYPTE-MELLET013Du côté des autos, le rapport poids puissance est plus favorable, surtout sur les modèles récents, et permet grâce à l’entraide de se sortir de toutes les situations. Les sangles sont rarement loin.

Après Tazerbo, nous découvrons les forages de la grande rivière. Ce projet pharaonique a pour objectif d’alimenter en eau les villes du Nord en puisant le précieux liquide dans les nappes fossiles du Sud. Les réserves qui ne seront jamais renouvelées devraient alimenter pendant seulement quarante ans les nombreux besoins, agricoles et domestiques.

Puis vient le lac de Bouzema avant celui d’Alfreda avec toujours cette eau translucide au beau milieu des dunes.

Au deuxième jour dans la grande mer de sable, notre caravane arrive sur le site du crash du Lady Be Good. Ce vieux bombardier américain découvert en 1958 a été l’instigateur d’une histoire tragique. Le 4 avril 1943, alors qu’il devait assurer un bombardement sur le port de Naples, l’équipage du se résoudre à abandonner sa mission, car les moteurs avaient avalé trop de sable pour fonctionner correctement. En panne d’essence et pensant être en pleine mer, les dix membres à bord ont sauté en parachute pour se retrouver à 500 kilomètres des côtes. Comprenant leur erreur, ils ont entrepris une marche vers le Nord qui leur sera fatale après 110 kilomètres. S’ils avaient tenté de retrouver l’épave, ils auraient sûrement survécu puisque la carlingue, presque intacte, contenait encore des vivres et des équipements radio en ordre de marche. À ce jour, seulement neuf des dix corps ont été retrouvés.

EGYPTE-MELLET017Tout émus de cette histoire, nous continuons notre route vers Tobrouk. L’Égypte nous attend.

À Saloum, le passage de frontière se passe sans problème. Le réceptif de l’agence s’occupe de tout. L’arrivée dans le pays change tous nos repères : l’accueil des gens est chaleureux. Tous nous saluent comme si nous faisions partie d’un rallye médiatisé. L’hôtel de Marsa Matrouh nous rappelle que le tourisme est la première industrie du pays. La concurrence est rude et du coup, les prestations élevées.

Ce n’est pas parce que nous sommes en Égypte que le rythme doit mollir. Sud Expé s’est fait une réputation de gros rouleur et c’est après 430 kilomètres que nous arrivons au Caire pour la visite des grandes pyramides. Malheureusement, celles-ci ferment à 16 h et ma montre affiche 15 h 45. C’est donc sous les sifflets des gardiens que nous tenterons la visite de ce site légendaire. Pas le temps… Jamais la frustration n’aura été aussi grande et ce n’est pas le spectacle son et lumière du soir qui compensera ce sentiment.

EGYPTE-MELLET016 Le lendemain s’annonce plus tranquille, nous n’avons que 409 kilomètres à parcourir avec comme clou de la journée la visite de Wadi Al Rayane, une zone de fouille où ont été découverts des centaines de fossiles de baleines préhistoriques datant de quarante millions d’années.

Malheureusement, la casse du moteur du camion en plein désert nous fera perdre un temps précieux et ce n’est que vers onze heures du soir que le groupe arrivera à l’hôtel. La solidarité ne pouvant être absente de ces moments-là, cette nuit passée dans les dunes restera comme celle qui a fédéré le groupe pour de vrai.

Les deux jours suivants se feront sans Christian Beilles occupé à assurer le rapatriement de son camion. Du coup, en panne d’ouvreur, le groupe ne saura profiter des subtilités du road book. Dans la peur de ne pas tenir le rythme élevé imposé par ce découpage ambitieux, nous raterons quelques-unes des plus belles étapes, dont le désert blanc.

 Cependant, les paysages qui nous mènent à Louxor sont de toute beauté. La passe de Karaouine étant sans conteste une vraie surprise d’autant que nous avons à trouver le passage dans une tempête de sable qui efface immédiatement les traces des véhicules qui nous précèdent. Le jeu de piste donne à chacun l’impression de vivre quelque chose d’unique.

EGYPTE-MELLET020La journée de repos à Louxor dans un cadre très luxueux permet de transformer nos aventuriers en touristes avides de visites culturelles, de balades en feloupe et de farniente autour de la piscine de l’hôtel. Dieu que cela a du bon.

 Cette journée permet aussi de retrouver Christian qui décide aussitôt de modifier légèrement le parcours pour ne léser personne. Nous irons bien voir le désert Blanc. Cette solution sera la bonne, car le trajet retour sans vent apportera une vision toute différente de ce que nous avions vécu précédemment. Ce choix nous offrira même les deux plus beaux bivouacs du voyage dont l’un au pied de la passe de Karaouine. Beaucoup l’imaginaient infranchissable dans le sens de la montée. Quelle ne sera pas leur fierté lorsqu’ils auront posé leurs roues tout en haut de cet abrupt de sable et de rochers ! La passe de Karaouine, désormais mythique, restera le symbole des limites psychologiques repoussées. Sûr qu’à ce moment, Christian Beilles aura mis en œuvre tout son savoir-faire.

Le Désert Blanc sera fidèle à sa réputation : unique dans sa géologie. Nous passerons le déjeuner à chercher les formes qui font sa réputation. Ici une tortue, là un faucon ou un personnage de BD. Les formations crayeuses ont été sculptées par le vent sur des millénaires et devraient encore surprendre les voyageurs pour de nombreuses années encore.

Les 1 200 kilomètres de hors-piste depuis Louxor, pour rejoindre l’oasis de Siwa s’avaleront en trois jours. L’occasion de vivre le deuxième apéro offert par l’organisation. Une façon conviviale de fêter notre sortie du désert. Les jours suivants ne seront que liaison et formalités pour rejoindre la Tunisie. De mon côté, privilège de journaliste, un avion m’attend au Caire. L’occasion de passer une pleine après-midi dans le musée du Caire à contempler les richesses des temps passés.

 S’il fallait conclure sur ce périple. Je dirais que le seul défaut de ce voyage aura été son rythme parfois trop élevé. Un défaut qui n’en est pas vraiment un puisque la clientèle des nouveaux raids Sud Expé est constituée d’habitués qui connaissent la réputation de l’agence et qui sont là pour vivre un surplus d’aventure lié aux derniers réglages de timing. Pour les autres, Christian Beilles a promis un découpage plus cool sur le futur départ en octobre. Dans ce cas, il n’y a pas à hésiter, ce parcours en vaut vraiment la peine.

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Le point sur l’assistance médicale et mécanique.

Il est très important de lever l’ambiguïté qui subsiste sur certaines plaquettes commerciales d’agences de voyages 4×4 :

On parle d’assistance médicale lorsqu’un médecin (si possible urgentiste) est présent sur le voyage pour intervenir au quotidien ou en cas de coup dur. Vu l’âge grandissant des participants, ce n’est pas un luxe. Tous les organisateurs ne disposent pas d’un médecin dans leur équipe d’organisation. Dans l’absolu, ce n’est pas une obligation, juste un service de plus. Mais voilà pourquoi il est préférable de se faire préciser ce point avant de partir, car certains appellent encore assistance médicale, la vieille boîte de sparadraps avec alcool à 90° qui traîne dans un tuperware depuis quinze ans.

Il en est de même pour l’assistance mécanique où il est très important pour le confort d’avoir un vrai mécano qui sera toujours prêt à vous aider ou prendre en charge les pépins qui pourraient survenir pendant le voyage. Ce mécano devra être différent de l’ouvreur pour ne pas pénaliser l’ensemble du groupe au premier incident mécanique…

 

 Encadré pratique :

Passeport valide six mois après le retour.

Traduction du passeport en arabe obligatoire pour la Libye.

L’ensemble des formalités (carnet de passage, plaques d’immatriculation et assurance auto) par véhicule coûte 220 euros en Libye et 380 pour l’Égypte. Par personne, visas et traduction reviennent à environ 172 euros.

Guide de voyage :

« Libye du Sud Est “par Jacques Gandini.

Lonely Planet Libye et Egypte

 

 

Obligations par l’organisateur :

GPS et CB obligatoire

Autonomie de 1000 kilomètres obligatoires soit 200 litres de carburant minimum.

Réserve de 30 litres d’eau obligatoire

Prix du carburant en Tunisie :

— gasoil : 0,48 euros

— super : 0,68 euros

Prix du carburant en Libye :

— gasoil : 0,10 euros

— super : 0,13 euros

Prix du carburant en Libye :

— gasoil : 0,15 euros

— super : 0,27 euros